
Ma classe d'AC
Par Lucie
La discipline
Jusqu'à aujourd'hui, il n'y a pas de grand changement dans l'enseignement des activités créatrices
Les activités créatrices apparaissent au programme scolaire en 1972. A cette date, sont introduits les cours d’activités créatrices textiles et les travaux manuels. Ces deux appellations ne sont pas modifiées au cours des années et leur enseignement reste sensiblement le même. Il s'agit principalement de création d’objets que les élèves peuvent exposer ou ramener à la maison.
C’est sans aucun doute, ce qui incite à penser que dans notre société actuelle, les activités créatrices sont vieillottes, voire obsolètes et qu'elles apportent des connaissances techniques qui ne sont pas utiles à tous·tes. Elles sont principalement sur la voie de la disparition, au profit des branches dites intellectuelles.
Les activités créatrices permettent l'apprentissage des capacités transversales du plan d'étude romand (PER)
Pourtant le PER retient cinq capacités transversales indispensables au développement des élèves. Ces capacités ne sont pas enseignées pour elles seules, mais doivent être sollicitées et acquises lors de l’enseignement des autres matières. L’enseignant·e est appelé·e à favoriser le plus souvent possible des mises en situation permettant à chaque élève d'exercer et d'élargir ses capacités. Il s’agit de la collaboration, de la communication, des stratégies d’apprentissages, de la pensée créatrice et de la démarche réflexive.
C’est à ce moment que notre branche d’activités créatrices devient importante aux apprentissages des élèves. Lors de l’enseignement d’activités créatrices, nous pouvons encourager les élèves à utiliser et améliorer toutes ces capacités. Celles-ci sont indispensables dans le quotidien et le futur milieu professionnel des élèves.
La pensée créatrice est au coeur de notre enseignement
Personne ne peut affirmer qu'il n'est pas créatif. Des études ont démontré que toute personne a un potentiel créatif. Il est juste plus ou moins développé selon ses acquis, sa culture, sa famille, son parcours de vie et ses influences. Les activités créatrices servent cet apprentissage de la créativité et permettent aux élèves de développer selon le PER « une pensée créatrice axée sur le développement de l'inventivité et de la fantaisie, de même que sur l'imagination et la flexibilité dans la manière d'aborder toute situation. ». En d'autres mots, il s'agit de permettre aux élèves de développer leurs connaissances cognitives comme l'inventivité, la pensée divergente et en plus la connaissance de ses émotions.
L'apport technique reste indispensable et bénéfique aux élèves
Cette créativité ne peut s’exercer qu’à partir d’un certain niveau de connaissance. (Maud Besançon et Todd Lubart, La créativité de l'enfant : Evaluation et développement, mai 2015). C’est pour cette raison que la production et l’apprentissage technique restent malgré tout intéressants dans notre enseignement. Cette production devrait par contre être alternée avec d’autres méthodes d'enseignement. Le référentiel de connaissances permet de ne pas inventer ce qui existe déjà et de pouvoir se risquer plus loin.
Les activités créatrices poussent les élèves à franchir leur limite par la pédagogie de projet
Seul·e·s, les élèves restent dans le connu et ce qui les rassure. Ils·elles évitent les problèmes et la prise de risque. Cela a comme conséquence de renforcer les acquis mais pas de développer de nouvelles compétences ni de permettre un développement créatif. Comme l’a démontré Lev Vygotski dans son livre "Mind in Society – Development of Higher Psychological Processes" (1978), l’enfant a besoin de tâches situées dans sa zone proximale de développement pour y arriver.
Cette zone proximale correspond à ce que l'élève peut faire avec l'aide d'un·e adulte ou de pairs plus avancé·e·s. Elle est toujours liée à un obstacle pour l'enfant. L'élève doit mobiliser ses connaissances qu'il·elle utilise en autonomie pour se surpasser et développer ses apprentissages. Il faut adapter la tâche pour que celle-ci soit atteignable par l'enfant avec un peu d'aide. Si la tâche est trop difficile, l'enfant se découragera. Cette zone proximale de développement varie d'un·e élève à l'autre. Cet accompagnement de l'adulte appelé concept d'étayage est important. Il peut se réaliser en collectif avec les enfants mais aussi de manière individuelle.
Une des solutions est la situation-problème ou la pédagogie de projet. Dans les domaines des activités créatrices, la pédagogie de projet peut être appliquée avec un cahier des charges. Après avoir acquis une base technique utile à l'exercice, l'élève doit résoudre le problème posé par l'enseignant·e. Il·elle doit s'interroger et faire des choix pour répondre aux consignes. Les problématiques sont multiples; quel objet? avec quoi? quels outils? comment? quelles procédures? pour qui? quel est le destinataire? L'élève devient un·e apprenti·e chercheur·e et développe sa créativité. De plus, il·elle est tenu·e de répondre à la demande et proposer un projet abouti, innovant et adapté.
L'évaluation dans les activités créatrices est difficile mais importante
Evaluer la créativité est une tâche complexe. Chaque élève a son propre stade de développement de sa créativité. Nous ne pouvons pas évaluer les travaux créatifs de tou·te·s les élèves de la même manière. Il faut prendre en compte le vécu et l'évolution des élèves. Il faut aussi faire attention au jugement de la rareté d'une idée. Cette idée doit être prise en compte dans son contexte de création. Les évaluations peuvent se réaliser au sein d'un groupe classe avec des élèves ayant le même vécu. Anderson & Krathwohl ont réalisé une taxonomie qui permet d'évaluer les élèves dans des situations diverses. L'une des meilleures évaluations de la créativité reste malgré tout l'auto-évaluation. Elle n'est pas facile à appliquer au début et demande d'apprendre à l'utiliser, mais elle permet aux élèves d'être conscient·e·s de leur valeur personnelle et de celle de leur travail.
La classe
Un climat de classe favorable à la créativité est indispensable
Le climat de travail est important pour le développement des capacités transversales et surtout de la créativité. L’élève doit avoir un climat sécuritaire qui lui permet la prise de risque, un environnement riche qui lui donne de l’inspiration, un environnement sans jugement qui évite l’auto-censure, un environnement sans compétition et récompense qui permet une motivation intrinsèque, une prise en compte de toutes les idées qui stimule la pensée divergente, un accompagnement qui encourage la persévérance, un cadre régulé mais souple qui permet la discussion ainsi que de la coopération et de l’interdisciplinarité.
Le cadre n'est malheureusement pas toujours adapté
Les activités créatrices, ne sont pas toujours valorisées à la hauteur de ce qu'elles apportent aux élèves. Leur mise en valeur n'étant pas égale dans tous les établissements. La distinction entre travaux manuels et couture est encore trop présente. Les directions peinent à instaurer des cours d'activités créatrices au sens large qui permettraient aux élèves de s'épanouir dans une pédagogie de projet. Trop souvent considérée comme amusement ou formateur de manuels, notre discipline n'a pas toujours les budgets adaptés à ses besoins. Les enseignant·e·s se retrouvent souvent confronté·e·s à un manque de matériel ou de machines. Dans ces conditions, il est difficile de revaloriser notre discipline et son apport aux élèves. Le recyclage fait évidement partie des sensibilités éthiques que nous essayons d'inculquer aux élèves, mais ne devrait pas être une systématique dans notre enseignement dû à un manque de moyen.
Les élèves
Nous armons les élèves pour leur futur
L'école est chargée de former les citoyens de demain. Nous leur apportons des compétences intellectuelles mais aussi sociales. La collaboration, la connaissance de ses valeurs, la persévérance, la connaissance de ses émotions, la communication sont quelques exemples de toutes les capacités que les élèves développent durant l'école et plus particulièrement les activités créatrices. Ces capacités sont indispensables à leur futur et leur permettront de faire face à n'importe quelle situation à laquelle ils seront confronté·e·s.
Nous préparons les élèves au monde professionnel
Nous ne cherchons pas à former des manuels destinés à un apprentissage, mais des personnes capables de réfléchir, de proposer une multitude d'idées, de synthétiser et de concrétiser leurs idées. Il existe de plus en plus de cours et de formation pour développer la créativité. Les entreprises ne recherchent plus des employés appliqués qui exécutent leur travail, mais des personnes capables d'apporter de l'innovation et des idées personnelles en adéquation avec leurs projets. C'est ce que nous apprenons à faire à nos élèves dans nos classes d'activités créatrices.